Ben Laden, mort et vif

Publié le par hugambrules

La situation en Afghanistan en 2011 est-elle pire qu’en 2001 ? Absolument, le bilan militaire est extrêmement négatif. La coalition internationale compte 140.000 combattants, sans compter les forces auxiliaires des sociétés privées. Les Etats-Unis et leurs alliés sont confrontés à une résistance des talibans à laquelle il ne s’attendait pas. Les 250 000 mille civils passent à pertes et profils de la guerre impérialistes. Les talibans sont beaucoup plus présents géographiquement qu’il y a dix ans. Ils contrôlent 75% du territoire afghan et ont les moyens de frapper Kaboul. Plusieurs attentats le prouvent. L’Otan a donc échoué. Le seul succès à noter, c’est qu’Al-Qaïda (qu’il ne faut pas confondre avec les talibans) est plus affaiblie qu’auparavant. Mais c’est un aspect à relativiser : le réseau s’est en fait renforcé dans les zones tribales pakistanaises. Les Etats-Unis ne pouvaient laisser passer les attentats du 11 septembre, cette gifle magistrale à la première puissance mondiale, cette première attaque étrangère sur le sol américain depuis deux siècles, sans punir les coupables. Au besoin ces coupables, faute de les connaître, ils les auraient désignés arbitrairement. L’Afghanistan faisait figure de cible idéale. Le pays était censé abriter Ben Laden et son état-major, dénoncés tout de suite comme les responsables des attentats. Le pays donnait l’occasion de remettre les pieds au Pakistan voisin avec qui les Etats-Unis étaient en froid depuis quelques temps, ou de se poser enfin dans ces états asiatiques anciennement soviétique qui sont toujours plus ou moins protectorats russes. Pour restaurer l’image de la super puissance américaine et le mythe de son invulnérabilité, sérieusement mis à mal par les attentats du 11 septembre, il y avait urgence à effacer cette impression détestable. Les talibans ont donc payé la note. Non pour le régime abominable qu’ils avaient instauré en Afghanistan, non pour leur invraisemblable oppression des femmes et des hommes de ce pays, mais parce qu’il fallait bien qu’un rebelle quelconque au nouvel ordre mondial, réel ou supposé, soit châtié. Pour servir de leçon à tous ceux à qui pourrait venir l’idée de ne pas accepter cet ordre, peuple, gouvernement ou classe dirigeante. L’Afghanistan a été bombardé pour l’exemple comme en d’autre temps d’autres furent fusillés pour l’exemple. L’ironie de l’histoire, c’est qu’ils ne se comptaient pas parmi les plus farouches ennemis des Etats-Unis. Non seulement ils avaient été mis en selle par les services secrets pakistanais avec la bénédiction de l’impérialisme, mais pendant les six ans de leur règne sur la majeure partie du pays, ils ont négocié soit directement avec l’administration américaine soit avec les trusts pétroliers américains. A côté de l’appui qu’ils étaient prêts à fournir à ces derniers pour l’exploitation et l’exportation du pétrole de la Caspienne, ils pouvaient penser qu’aux yeux de Washington la lapidation de quelques dizaines de femmes adultères ou la destruction des bouddhas de Bamiyan, ou même l’hospitalité accordée à Ben Laden, n’étaient que peccadilles. Jusqu’au dernier moment d’ailleurs les talibans se sont montrés bien conciliants. Car après tout, leur demande de preuves (jamais fournies par les autorités américaines) de la culpabilité de Ben Laden n’avait rien d’exorbitant. En d’autres lieux et pour d’autres partenaires, c’est admis comme règle normale. Passés les premiers moments de panique de leur président, les gouvernants n’ont pas été longs à comprendre le parti qu’ils pouvaient tirer des destructions de NY. Tellement évident que même aux Etats-Unis, certains se sont demandé si l’administration ou des services comme la CIA ou le FBI, indépendamment de leur visible incompétence, n’auraient pas laissé faire volontairement.

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