Molex sans rolex

Publié le par hugambrules

Dans une opération de pure prédation, Molex a racheté le site en 2004 pour récupérer brevets, savoir-faire et parts de marché. À l'origine, le site de Villemur-sur-Tarn (Haute-Garonne) abritait deux entités. Cinch, qui possédait uniquement le matériel de connectique ainsi que les parts de marché, et Labinal, qui lui louait le personnel. En 2000, la SNECMA rachète cette double structure familiale, installée à Villemur depuis soixante-huit ans, en annonçant la couleur d'entrée : elle compte s'en débarrasser. La SNECMA transfère le personnel de Labinal chez Cinch, qui devient une entreprise à part entière, donc vendable. Dès 2003, le nouvel assemblage s'avère même une bonne affaire : il réalise un chiffre d'affaires de plus de 65 millions d'euros, avec un résultat net de 11 % (7 millions de bénéfice). Au premier trimestre 2004, le résultat net anticipé bondit à 17 %. C'est là qu'intervient Molex, le numéro deux mondial de la connectique, et là que commencent les problèmes. Le groupe américain Molex, contrôlé à 60 % par des fonds de pension, rachète Cinch pour 27 millions. Dans l'opération, il se retrouve d'emblée gagnant sur tous les tableaux. Tout d'abord, la division automobile européenne de Molex, alors dans le rouge, voit son chiffre d'affaires passer de 4 % à 8 % grâce au rachat, et se retrouve d'un coup bénéficiaire. Du plus, l'entreprise américaine s'implante dans le marché en récupérant les commandes de PSA, principal client du site de Villemur-sur-Tarn. Enfin, Molex accède à une technologie qui lui faisait jusqu'ici défaut. Dès 2007, le groupe a commencé à transférer aux États-Unis les outillages et savoir-faire, les salariés en ont la preuve. Mais deux éléments laissent à penser que la fermeture du site aurait en fait été ourdie dès le rachat en 2004. Premièrement, Molex a négocié avec la SNECMA, au moment du rachat, la fermeture d'une « chaîne de traitement de surface », pourtant très performante. Deuxièmement, le groupe n'a jamais voulu racheter les locaux, qu'il se contente de louer. « Comme par hasard, au moment de l'annonce de la fermeture, la direction a annoncé qu'elle ne gardait que ses sites qui possèdent une chaîne de traitement de surface, et dont elle est propriétaire des murs », raconte Guy Pavan, délégué CGT. En octobre 2008, le transfert des savoir-faire achevé, Molex passe à la casse. Le groupe annonce la fermeture de l'entreprise, qui avait engrangé 1,2 million de bénéfices pour 2008 et 500 000 euros pour le premier trimestre 2009. La direction se justifie en annonçant que le site ne sera probablement pas rentable à l'exercice 2009. Le groupe parle alors de délocaliser la production en Slovaquie. En janvier, Molex change son fusil d'épaule : les sites slovaque et allemand seront également fermés et toute la production européenne sera délocalisée aux États-Unis et en Chine.

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